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Analyse

Les mouvements sociaux transnationaux des peuples autochtones au Guatemala et l’exercice de leur influence

Prix de la Diplomatie Non Gouvernementale, édition 2008

Par Mélanie Connelly

juillet 2006

Cette étude proposée par M.Connelly a remporté le « Prix de la Diplomatie Non Gouvernementale », édition 2008. Ce Prix - co-fondé par *l’école doctorale de Sciences Po, l’Institut de recherche et débat sur la gouvernance (IRG) et Coordination SUD, la Coordination nationale des ONG françaises de solidarité internationale - *vise à recompenser chaque année les meilleurs travaux portant sur l’action des ONG et des autres acteurs de la société civile au niveau international La présente étude porte sur l’action internationale des peuples autochtones au Guatemala en vue d’obtenir une reconnaissance par les autorités nationales de leurs droits. Tant sur son aspect monographique que par son approche théorique, celle-ci apporte une vision nouvelle de la problématique des minorités et de la défense de leurs droits, souvent méconnus ou bafoués. Le mémoire de Mélanie Connelly s’inscrit parfaitement dans l’objectif poursuivi par les trois institutions qui soutiennent le prix : comprendre les motivations et les raisons de l’efficacité de l’action des ONG et des mouvements sociaux dans le débat public et la négociation internationale.

Table des matières

Résumé de l’étude

L’étude des acteurs non gouvernementaux révèle qu’ils ont trouvé de nouvelles manières de répondre aux défis politiques actuels afin de prendre leur place, jouer un rôle et influencer les relations gouvernementales et non gouvernementales. Devant les difficultés rencontrées pour atteindre les politiques gouvernementales, les mouvements sociaux des peuples autochtones se sont transnationalisés afin d’exercer leur influence sur les organisations internationales et ensuite atteindre les politiques gouvernementales. Plus précisément, une étude de trois cas de mouvements sociaux transnationaux des peuples autochtones du Guatemala évalue leur impact sur les politiques domestiques et internationales.

L’approche constructiviste sous-tend l’argumentaire du mémoire, élaboré à partir du modèle de boomerang, où la circulation des idées influence la formation des intérêts et des identités des acteurs politiques. Au niveau international, la fin de la Guerre froide, la « troisième vague » de démocratisation et la mondialisation posent les conditions propices à la transnationalisation des mouvements autochtones alors qu’au Guatemala, une fenêtre d’opportunité s’ouvre grâce aux négociations entreprises en vue de mettre un terme au conflit civil (1960-1996).

L’étude de trois mouvements sociaux transnationaux du Guatemala, Defensoría Maya (Défense Maya), Majawil Q’ij (Nouvelle aurore) et CONAVIGUA (Coordination nationale des veuves du Guatemala) révèle qu’ils profitent de cette conjoncture favorable pour s’organiser autour de l’identité autochtone et développer un répertoire d’action collective transnational. Devant la répression étatique dirigée vers les peuples autochtones, et suivant le constat qu’ils rencontrent des difficultés semblables d’État en État, plusieurs mouvements autochtones déplacent leurs revendications dans la sphère internationale en vue de trouver une réponse globale à des problèmes globaux. Le détour par l’arène transnationale et la création d’alliances avec d’autres mouvements sociaux, des États et des organisations internationales vise à multiplier les pressions sur le gouvernement du Guatemala afin que les normes internationales en terme de droits des peuples autochtones soient respectées.

Le répertoire d’action collective des mouvements sociaux transnationaux Majawil Q’ij, Defensoría Maya et CONAVIGUA s’articule principalement selon quatre stratégies : la circulation de l’information, l’instrumentalisation de symboles liés à l’identité autochtone, l’utilisation d’autres acteurs gouvernementaux et non-gouvernementaux comme leviers politiques et l’imputabilité du gouvernement du Guatemala devant ses engagements nationaux et internationaux. Ce répertoire s’ancre résolument dans l’expression d’une identité autochtone valorisée et dans la construction d’un espace politique citoyen inclusif.

En conclusion, l’exercice de l’influence des mouvements sociaux transnationaux des peuples autochtones se traduit par des changements destinés à obtenir une reconnaissance des droits des peuples autochtones au niveau international, notamment au sein d’organisations internationales telles que l’OÉA et l’ONU afin d’appliquer ensuite ces normes au Guatemala. L’ouverture subséquente de l’arène politique nationale à leur participation est un progrès important pour les mouvements autochtones. Cependant, plus ils s’approchent de l’État du Guatemala, plus il leur est difficile d’exercer leur influence. Les changements dans les comportements de l’État et la mise en Ĺ“uvre des transformations politiques négociées sont donc réels, mais limités.

 

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