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Capítulos

Quelle fiscalité pour quelle démocratie?

Por Andrea Ichino, Alberto Alesina, Alexis Canuet, Gilles Raveaud

Libro : Chroniques de la gouvernance 2008

Palabras clave : Economía

Contenido

S’accorder sur les critères de justice

L’impôt n’est jamais populaire chez les contribuables appelés à le verser ; et pourtant, l’histoire des pays développés, notamment des pays européens dans la deuxième moitié du XXe siècle, montre que, à mesure que les sociétés s’enrichissent et se complexifient, le nombre des fonctions assurées collectivement s’accroît et la part des prélèvements obligatoires dans le PIB augmente. C’est ce modèle qui semble aujourd’hui remis en cause ; le cas français, rappelé ici par Gilles Raveaud, illustre bien une tendance plus générale : bouclier fiscal, multiplication des déductions d’impôt pour les ménages, défiscalisation des heures supplémentaires… Voici les idées clés proposées en 2007 pour redresser l’économie française. Quoi que l’on pense de cette stratégie, force est de constater que la fonction publique y figure exclusivement du côté des dépenses ; dépenses nécessaires, ajoutera-t-on aussitôt, notamment lorsqu’il s’agit de financer les fonctions régaliennes de l’État. Mais l’idée que la dépense publique, notamment dans les services sociaux, est un investissement pour l’avenir peine à se faire entendre – comme celle que la fonction publique, loin d’être une entrave à la croissance, contribue à rendre l’économie plus dynamique. Dans ce débat, il en va plus que du modèle de développement ; comme le rappelle Pierre Rosanvallon, la nation est un espace de redistribution, et la perception de l’impôt révèle celle des critères de justice qui doivent présider à l’organisation de la vie commune. S’accorder sur les critères de justice, qui sont forcément multiples et contradictoires, voilà la tâche essentielle de la délibération collective qui définit la démocratie même, qu’elle soit nationale ou post-nationale. Or, c’est précisément ce débat-là qu’on veut évacuer de l’espace public lorsque l’on réduit les marges de manÅ“uvre de l’action collective.