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Le modèle démocratique à rude épreuve: la tension légalité-légitimité/Quelle légitimité pour les acteurs extérieurs en situation de crise et de conflit?
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Au début du mois de janvier 2007, le quotidien britannique The Daily Telegraph faisait état de cas de viols par des Casques bleus au Sud-Soudan. Les autorités de Khartoum auraient accumulé un certain nombre de preuves, témoignages et enregistrements vidéos. Sans mettre en cause la véracité des faits mis en cause – c’est à la justice de l’établir – on peut se demander si ces accusations ne s’insèrent pas dans une opération de communication visant à porter le discrédit sur les forces de maintien de la paix : en effet, elles coïncident avec un regain de pressions exercées par les Nations unies sur le régime soudanais pour que soit déployée une nouvelle force multinationale, dans l’ouest du pays. Cet exemple nous rappelle combien la légitimité d’une intervention extérieure – même multinationale – sur le territoire d’un État souverain, n’est jamais chose acquise. On se souvient que les personnels de plusieurs organisations non-gouvernementales –bénéficiant pourtant d’un certain capital de sympathie – ont déjà fait l’objet d’accusations similaires. On se souvient aussi du lynchage de soldats américains dans les rues de Mogadiscio, en 1993, ou encore de ces quatre hommes, employés par la société militaire privée américaine Blackwater, fusillés, pendus, brûlés puis démembrés par la foule à Falloujah en 2004. Les modalités d’intervention sont importantes, mais en situation de conflit, n’importe quel acteur peut devenir la cible et l’objet d’une exaspération engendrée par des années de violence : l’étranger, loin d’être vu comme le libérateur, reste aussi dans bien des cas l’intrus. Situation d’autant plus complexe que la gestion des crises multiplie les occasions de contact avec les populations locales. Dès lors, l’enjeu est double : il s’agit, certes, de convaincre les autorités et populations locales du bien-fondé d’une intervention extérieure, mais aussi d’assurer la sécurité de ces intervenants extérieurs dans un environnement qui leur est bien souvent hostile. Car dans un contexte d’hypersensibilité des opinions occidentales à l’emploi de la force, c’est la légitimité de l’intervention qui pourrait venir à faire défaut. L’investissement du champ de pratiques humanitaires serait-il gage d’une meilleure réception des interventions extérieures ?