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Le modèle démocratique à rude épreuve: la tension légalité-légitimité/La religion, outil de légitimité politique?

By Mohamed Larbi Bouguerra, Colette Braeckman, Patrick Michel

Book : Chroniques de la gouvernance 2007

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« C’est en vain qu’on cherche à remplacer Dieu. Rien ne saurait combler le vide de son absence » : en disant ces mots, le pape Jean-Paul II affirmait avec force le rôle de la foi dans le contrat social. L’idéal républicain d’un État laïc et d’un espace public où primerait le seul usage de la Raison, fondatrice d’une religion civile, serait porteur de bien des dérives : « Une démocratie sans valeurs se transforme facilement en un totalitarisme déclaré ou sournois comme le montre l’Histoire. » Un rapide balayage de l’Histoire nous rappelle aussi que l’argument religieux a souvent été au cœur de stratégies de domination politique : la monarchie de droit divin en est un exemple. Aujourd’hui encore, dans un contexte de mondialisation et de brassage culturel croissant, on voit certains régimes trouver dans la religion la justification d’une morale conservatrice érigée en doctrine d’État, ouvrant la voie à un contrôle parfois très poussé du social. Pourtant, l’exemple polonais nous montre qu’il faut aussi clairement distinguer la religion, comme institution, de l’argument religieux, comme variable politique. L’absence de laïcité ne doit pas nécessairement suggérer l’idée d’une connivence entre les institutions religieuses et le pouvoir politique, quelle que soit sa nature : la religion, par ses structures, par ses ancrages territoriaux, peut aussi constituer la base d’une mobilisation autonome de la société civile. Étymologiquement, le terme religion désigne ce qui relie les hommes : dans les situations où l’État peine à entretenir le lien avec ses citoyens, les structures religieuses, peuvent-elles assurer une fonction supplétive ? Au-delà de la référence à la foi, quel peut être leur place dans l’édification d’une gouvernance démocratique ?